Il y a des jours comme ça où nos certitudes s’effondrent, où ce que l’on croyait dur comme fer s’avère en fait erroné. Jusqu’à peu, je disais en effet lors des formations que j’organise que l’absentéisme était élevé chez les populations en contact avec les clients difficiles. En même temps, j’avais pas l’impression de révéler la vérité du siècle en disant ça. Mais figurez-vous que c’est faux. On pourrait presque dire au contraire que plus les clients sont difficiles et plus l’absentéisme est faible. Vous l’auriez cru, vous ?
Je viens de faire cette découverte grâce à une enquête sur les origines de l’absentéisme pour une grande banque nationale. Je me suis baladé un peu partout en France pour observer le fonctionnement de leurs agences et tenter de comprendre pourquoi les taux d’absentéisme entre elle variaient souvent du simple au double. Parmi les agences étudiées, certaines étaient situées dans des zones urbaines sensibles (ZUS), euphémisme ou hypocrisie administrative pour désigner les quartiers « chauds », quartiers où les clients sont réputés difficiles.
Concrètement, un client difficile est un client désagréable, voire irrespectueux. Cela va du regard froid à l’agression physique en passant par la remarque désobligeante, l’insulte et le crachat. Tout un programme !
En regardant les taux d’absentéisme des agences situées dans ces ZUS, je me suis aperçu à ma plus grande surprise qu’ils se situaient dans la moyenne, voire au-dessous, des taux départementaux de cette banque en question. Voici les explications que j’ai pu tirer de mon enquête sur le terrain :
- Tout d’abord, ces établissements avaient des effectifs renforcés par rapport aux autres. Si bien qu’aucun des chefs d’agence ne se plaignaient d’être en sous-effectif chronique, contrairement à leurs confrères. Les salariés jouissaient aussi de quelques autres avantages pécuniaires ou en nature par rapport à leurs collègues d’autres agences. Si bien qu’aussi bien les employés que les managers se sentaient soutenus par la direction des RH de leur département.
- Ensuite, les directeurs de ces établissements étaient quasiment tous considérés comme de très bons managers par leur hiérarchie. Autrement dit, on ne les avait pas placés à la tête de ces agences par hasard.
- Enfin, les employés étaient particulièrement soudés et solidaires. Sachant que les incidents avec les clients étaient relativement fréquents, pouvant arriver à chacun d’entre eux et à tout moment, ils faisaient preuve d’une surprenante solidarité entre eux pour soutenir ou prendre le relais d’un de leurs collègues en proie à un client agressif.
Quelles étaient alors les agences bancaires qui connaissaient le plus fort taux d’absentéisme du département, me demanderez-vous ? Ni celles où les clients sont jugés les plus difficiles, ni celles où ils sont jugés les plus faciles (les zones rurales paisibles et les beaux quartiers)… mais celles entre les deux ! Plus précisément, les agences les plus touchées étaient celles situées dans des banlieues sensibles mais non considérées officiellement par le siège départemental comme difficile. Elles cumulaient alors deux handicaps : les clients étaient réellement difficiles, mais les agences ne bénéficiaient d’aucune attention spécifique. Pas de chance, les gars !
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